Parce que nous sommes modernes, inventifs et inspirés, nous testons pour vous, chers lecteurs, chères lectrices, le premier compte-rendu collaboratif, rédigé depuis le train qui nous ramène d'une belle sortie à Pen Hir. (Edit : bon en vrai le wifi du train n’est pas aussi moderne que nous donc ça sera depuis chez nous). Voici donc un compte-rendu d’une efficacité légendaire, écrit à 28 mains ou presque (certains n’écrivent peut-être qu’avec une main…), dans un joyeux bazar.
Cet été, la Bretagne ca vous gagne ! Sous un soleil de plomb, 14 lémurien·nes s'élancent dans les falaises de Pen Hir. Certain·e·s avaient du plomb dans l'aile et ont fait de belles chutes. Aucune blessure à déplorer, nos grimpeur·euse·s sont solides comme du fer.
Bienvenue au far ouest. Il y a des phoques et des goélands. Et il y a du soleil, brulant. Y a des dalles et des monolithes. Y a des balades sur le fil, y a des surprises sur prises. C’est rappel sur rappel, attention à la marée. On monte sur la vigie, on déguste la pure beurre, on s’épuise sur la dalle des pêcheurs, on glisse sur la dalle de verre. Dans la crique, y a celle de gauche et celle de droite. On se prend des embruns à court terme et des secs sur la diabolos. A gauche de la fissure verte, on descend dans le bocal pour se faire la roche décollée. Quand ça cogne trop, on se replie au fond du cirque des courants d’air ou on prend l’ombre sur la banquise. Au rez-de-chaussée, on pique une tête. Un phoque nous tient compagnie. Et quand on n’a plus d’inspiration, on se fait la voie 10 et la voie 11 ou les deux surplombs de la dalle des débutants. Dimanche, le temps se couvre. Rendez-vous sous la croix de Lorraine ? Il y a anguille sous roche. Ça sent le rififi chez les poulpes. On dépasse en funambule des débutants arrimés au rocher. Cécile et Mathieu nous estournent en bichonnant une main courante. Face Nord, il y a du vent et du gaz. C’est déjà la fin. On a du vague à l’âme. On n’a pas fait la Tourette car on n’avait pas la patate, ni le dévers gondé car on était trop sage. Reste le grand Daouët et le Douar Nevez. Faudra revenir.
Cette année, un Pen Hir… sans peines ! Du soleil sans nuages, des crêpes au miel et au citron (les meilleures), du cidre brut et surtout pas doux, une mer plate, des voiliers au large, des grandes voies belles et pas trop dures, une ribambelle de grimpeurs de bonne humeur…
Vous a-t-on parlé de Funambule ? C'est LA grande voie à faire à Pen-Hir, le passage obligé de toutes les cordées de cette sortie, jour après jour. Celle qui résume bien la philosophie de l’escalade à Pen-Hir, à savoir « pas besoin d’aller dans le dur pour se faire plaisir ». Car Funambule, c’est 4 longueurs ou plutôt 3 (tout le monde s’accorde qu’on peut en doubler une, même si le choix du relais à sauter fait débat), facile (4/5a) et superbe. On débute par une petite dalle accessible à pieds à marée basse (pour s’occuper en attendant, il y a les jolies couennes du cirque des courants d’air), avec une belle traversée, facile, gazeuse, superbe, pour arriver à un relais les pieds dans le vide. Ensuite une courte longueur un peu verticale et gazeuse, qui débouche sur une très belle plateforme pour un relais tout confort où on en prend plein la vue. Pour finir, une jolie longueur discrètement traversante qui débouche au pied de La Croix de Lorraine, devant les touristes. Une belle expérience, pour les débutants comme les expérimentés !
« Mais il fait quoi cet hurluberlu ? » : c'est ce que pensaient probablement les visiteurs hagards de la croix de Lorraine qui voyaient apparaître une paire de mains, puis une tête transpirante, et un corps rampant sur la plateforme rocheuse dans un raffut de cliquetis d'accessoires. Un phoque ? Oui voilà. La même manière de se mouvoir, c'est exactement ça. Amusant et en même temps aux antipodes de la promesse d'habileté, de délicatesse et de légèreté donnée par le reste de la voie ; sur la pointe des pieds, en traversée, en suspension au-dessus des vagues, au bord de la falaise, en pas chassés sur une crête : nous étions des phoques-funambules.
Super expérience à PenHir : de la grimpe, des baignades, des apéros et des repas dignes de restaurants étoilés. Tout ça sous une météo estivale et avec un groupe attentif et des conseils avisés en couenne ou pour les manip en grande voie.
Il y a toujours une petite appréhension à se laisser glisser le long de la corde rappel sur les falaises de Pen-Hir. Même si la mer était particulièrement calme cette fois-ci, les rochers couverts de moules et les embruns nous rappellent qu’il n’y a pas d’échappatoire de ce côté et qu’il va bien falloir remonter en grimpant. La grimpe se fait donc humble, dans des cotations dont nous sommes certains ou en nous laissant des moulinettes. La récompense de la baignade dans une eau fraîche (mais pas froide!) et cristalline est tout de même là en soirée lorsque nous regagnons la plage avant de rentrer au gîte…
… invasion de salpes et de lémurien·ne·s sur la plage de Veryac'h. Fin juin les Bretons ont pu observer des créatures molles (et parfois translucides) sur le sable et dans les vagues.
« Plutôt 5c que 5a à mon avis… », « Tu peux m'éplucher les carottes ? », « Le phoque était encore là cette année !! », « Mais ils ont foutu quoi avec les topos ?! Pourquoi ils ont décôté cette voie ?! », « Qui veut de la bière ? », « Le point était trop loin, j'ai flippé », « Leurs relais non-chaînés ils sont tous pétés ! ». Voilà ce qu'on pouvait entendre autour de la table le soir dans les conversations post-grimpe. S'en suivait très rapidement des discussions sur le programme du lendemain : « OK mais c'est toi qui fais la 1re longueur ! », « C'est à quelle heure la marée basse demain ? », « J'suis chaud pour me faire une après-midi sur du dévers, qui veut venir ? », « J'ai un créneau entre 14h et 15h30 pour Diabolo, sinon mon agenda est complet ». C'était l'heure des tractations en vue de former un binôme éphémère, des petits arrangements, des échanges de cordes contre des dégaines, des regards complices et des sourires mutins en réponse à « Vous allez où demain ? ». Et puis question organisation il y avait la deuxième école, celle des gens qui ne prévoyaient rien, qui se demandaient ce qu'ils pourraient faire une fois arrivés sur place, le matin, à la cool : « Tu préfères aller plutôt à gauche ou à droite du tas de cailloux, là ? ».
Le petit phoque nous observa avec curiosité tâter de nos nageoires les moindres aspérités.
Le dimanche, Matthieu et Bichon seront moteurs d'une bien jolie aventure : ils iront, à la sueur de leur front, placer une main courante sur une paroie perchée à 50 mètres au dessus du vide, permettant aux autres cordées de traverser sans risque vers un secteur difficilement accessible, mais ô combien sensationnel ! Des voies situées sur les différentes faces d'un monolithe, tant appréciées pour leur beauté que pour la solitude qu'elles offrent. Des photos dignes de couverture de topo seront réalisées pour immortaliser le moment.
L'heure de Germaine a sonnée ! Au compte-goutte, la troupe se retrouve Chez Germaine. Jean-Michel prend une galette. Matthieu et Louis une glace au piment oiseau. Jean-Michel prend une deuxième galette. Louis enchaîne sur une glace au lait ribot pour déminer la zone. Jean-Michel commande un Kouign-amann tandis que Stéphane teste sept boules – sablé breton, blé noir, banane flambée, pêche de vigne, cacahuètes, choca Breizh, ananas ! Jean-Michel a encore une petite place et se lance sur la complète andouille. Un pichet-broc-cruche-carafe (faîtes votre choix) avec refill infini de cidre BRUT est également présent sur la grande tablée pour accueillir celles et ceux qui sont encore sur le grès armoricain ou qui barbotent dans l'océan.
Grimpeurs (auteurs et photographes) : Alice, JM, Pauline, Nina, Cécile & Cécile, Shane, Louis, Gaëlle, Stéphane, Christophe, Paul, Matthieu et Aurélien